Vendredi dernier en début de soirée fut projeté, en avant-première, le film algéro-portugais, relatant l’histoire de Manuel Teixeira Gomez, ancien Président de la république portugaise, refugié dans la ville de Bougie.
C’est en grande pompe que la cérémonie a eu lieu en présence du réalisateur Paulo Monteiro, des deux producteurs Pedro Bento et Amina Haddad, accompagnés de plusieurs acteurs tant portugais qu’algériens. L’événement a également été honoré par la présence du wali de Béjaïa, Mohamed Hattab qui découvrait pour la première fois la cinémathèque de la ville, ainsi que le directeur général de la cinémathèque algérienne, M. Semiane. Avant la projection, il y a eu une longue discussion entre le wali et l’ensemble des personnalités présentes pour cet événement. Mohamed Hattab s’est enquis des conditions de tournage et de réalisation du film et a fait l’éloge de Béjaïa comme ville de cinéma, vu ses potentialités historiques, culturelles et artistiques. Paulo Monteiro a rappelé les conditions dans lesquelles s’est fait le tournage et a remercié la ville de Béjaïa pour son accueille, la richesse de sa culture et le climat de sérénité dans lequel s’est fait le tournage, rappelant qu’il a trouvé sur place de grands talents qu’il a exploité dans ce film, à l’exemple de Boualem Zeblah, Mohamed Lefkir et Idir Benaibouche, sans oublier celui qui a campé le rôle du Meddah, Fodil Assoul. Amina Haddad a rappelé que l’équipe technique a été composée de nombreux techniciens de Béjaïa, dont beaucoup travaillent au théâtre.
Le wali Hattab assiste à la projection Lui emboitant le pas, Abdenour Hochiche, président de l’association Project heurt’s et organisateur des rencontres cinématographiques de Béjaïa, a rappelé que le potentiel existe bel et bien dans cette région, puisque les RCB existent sans interruption depuis une quinzaine d’années et que c’est l’événement cinématographique le plus en vue en Algérie, au vu de sa longévité. Sur ce, la projection a eu lieu. Le film a été monté sous forme de trois blocs, évitant la linéarité du récit. Il y avait une alternation entre différentes partie de l’histoire, permettant de produire des scènes relativement courte, sans que le spectateur n’ait le temps de s’ennuyer. Manuel Teixeira Gomez était président de la République du Portugal dans les années vingt. Réformiste, il était populaire, mais dérangeait l’establishment qui voulait se débarrasser de lui. Les intrigues politiques et les coups bas irritaient le président. Lui-même était un grand voyageur qui avait, dans sa jeunesse, sillonné toute l’Europe et la Méditerranée. Il a fréquenté les cercles littéraires et était lui-même écrivain. Son domaine de prédilection était les romans érotiques. Ses opposants ont profité de cette situation pour l’attaquer pour immoralité. Le Président Gomez ne tenait pas plus au pouvoir et a, donc, décidé de démissionner malgré l’opposition de son entourage. Un jour, il demande à son secrétaire particulier de lui trouver une place dans le premier bateau en partance de Lisbonne. Il dépose sa démission et cinq jours plus tard, il embarque dans un bateau en partance vers l’Afrique du Nord. Le nom de ce bateau était «Zeus». D’où le titre du film. À soixante-cinq ans, il se retrouve à nouveau en aventurier, et visite l’Algérie qu’il connaissait déjà. Le film s’arrête un moment à Djanet, où on le voit prendre du thé avec des Touaregs, et à Annaba. Il décide de repartir pour la ville de Bougie pour y rester une semaine, à l’hôtel de l’Etoile. Il y restera onze ans pour y mourir en 1941.
Le film reste à l’affiche de la cinémathèque Teixeira Gomez était tombé amoureux de Béjaïa et en a fait l’éloge dans ses romans. Son séjour à Béjaïa a été raconté dans le film avec une certaine sobriété. L’objectif des producteurs était de souligner la beauté de la région, en relevant le contexte historique dans lequel vivait Gomez. Sur le plan international, furent évoqués l’Éthiopie, l’Italie et la volonté de ce dernier de s’installer en Afrique du Nord. C’était également cent ans après la colonisation de l’Algérie par la France. Sur le plan interne, c’était l’époque de l’Etoile Nord Africaine, Ferhat Abbas, Messali El Hadj et des Oulémas. Le balbutiement du nationalisme algérien fut souligné à plusieurs reprises, mettant en valeur la résistance des autochtones à l’occupation et son désir de liberté. Le film a duré deux heures. Il était impossible de le prolonger davantage, au risque d’ennuyer le spectateur, même si beaucoup restait encore à dire. Le public a ainsi pu profiter des conditions de projections de haut niveau avec une qualité d’image et de son de haut niveau. Après la projection, un riche débat s’est instauré dans la salle, faisant intervenir le réalisateur, les producteurs, les acteurs et les scénaristes pour apporter des éclaircissements et répondre aux questionnements des spectateurs. Le film reste en projection à la cinémathèque de Béjaïa pendant une dizaine de jours avant de s’en aller faire le tour des autres salles de la Cinémathèque Algérienne. Au Portugal, Paulo Monteiro nous a informés qu’il a été projeté dans quatorze salles à Lisbonne en cinq semaines. Ce qui est un fait assez inhabituel. Les Portugais ont ainsi découvert le plus inconnu de leurs présidents, ainsi que la ville de Bougie, inconnue pour la plupart d’entre eux. Ce film a, donc, été une véritable vitrine pour l’Algérie, l’Afrique du Nord et les Berbères, puisque dans une des scènes tournées au Café Richelieu à la place Gueydon, Manuel Teixeira Gomez a rappelé que Zeus était une divinité berbère.
N. Si Yani
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