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Photo du rédacteurNabil Z.

« Divorce Sans Mariage » de Walid Bouchebah Dignement Représentée au Festival d’Avignon

Une troupe de théâtre de Béjaia est allée représenter l’Algérie au Festival de théâtre d’Avignon en France. Produite par Johanna Griesser de la compagnie In Theatro Veritas, la troupe conduite par Walid Bouchebah semble avoir séduit le public international présent à Avignon tout le long du mois de Juillet passé.



Remarqué à l’occasion de la pièce de théâtre produite par « Banat Houwa » de Béjaia, Article 146, les organisateurs du Festival International de Théâtre d’Avignon ont invité Walid Bouchebah à présenter une pièce à l’édition de 2016. C’est un défi que le metteur en scène a relevé, en adaptant une œuvre totalement improbable aux planches. Il s’agit du « Journal » de Mouloud Feraoun. Une œuvre non destinée à être jouée au théâtre.  Le livre de Feraoun n'est pas un journal intime qui raconte la rythmique de la vie privée de l’auteur. C’est un témoignage poignant de ce qu’il a vu et vécu pratiquement au jour par jour, durant les événements de la guerre d’Algérie.


Le défi n’était pas facile à relever. Tout comme sa précédente pièce « Article 146 » ou il s’est attaqué au tabou du Code de la Famille et des droits de la femme en Algérie, Walid Bouchebah a eu à cœur de relater les événements douloureux de la guerre de libération nationale, par l’entremise d’une œuvre signée par l’un des géants de la littérature algérienne. Pour réussir son pari, le metteur en scène a fait appel à des chevronnés des planches et de la représentation théâtrale et cinématographique. Il s’agit de Foudil Assoul, Farouk Boutadjine et Mourad Oudjit. Sans moyens aucuns, la troupe se met au travail, sans même disposer d’un lieu pour les répétions. C’est donc dans des lieux publics, comme la Brise de Mer, que les ajustements se sont faits. La troupe n’ayant reçu aucune aide des autorités de la ville ni de celle de la wilaya, elle a dû se débrouiller avec les moyens de bord. Et c’est en fin du mois d’Octobre dernier que la troupe a eu l’honneur d’ouvrir la 7eme édition du Festival International de Théâtre de Béjaia, avec l’adaptation du « Journal » de Mouloud Feraoun, sous le titre de « Divorce sans mariage ». Détail important à relever, la pièce est entièrement jouée en français.


Depuis la réception de l’invitation à participer au Festival d’Avignon, Walid Bouchebah et son équipe ont tout fait pour trouver les moyens de leur départ et de leur séjour dans la ville française. En plus des frais de voyage et de séjour, il fallait également louer une salle de spectacles pour y présenter la pièce. En Algérie, toutes les portes semblent leur avoir été fermées. Ni la wilaya de Béjaia, ni la commune, ni la Direction de la Culture, ni même les sponsors publics et privés n’ont voulu mettre la main à la poche. C’est donc avec leurs moyens propres que les comédiens ont fait le déplacement, étant conscients qu’au-delà de leurs personnes, c’est toute l’Algérie qu’ils allaient représenter. Ils sont donc partis à cinq : Walid Bouchebbah, les trois acteurs et le régisseur Walid Bourmani.


Arrivés sur place, l’équipe s’est très vite mise en branle pour mettre en place la logistique nécessaire. Il fallait aussi faire la promotion du produit en sillonnant les rues et les places publiques d’Avignon pour distribuer des prospectus et convaincre le public d’aller assister au spectacle. Car au Festival d’Avignon cette année, il y avait pas moins de 1092 compagnies venues de différents pays, pour présenter 1416 spectacles. C’est dire combien la concurrence était rude. Tous les styles du spectacle vivant ont été représentés. Théâtre, musique, danse, marionnettes-objet, poésie, cirque, clown, etc… Heureusement que dans « la Cité des Papes », il y a une quarantaine de salles de spectacles, et c’est à l’ « Atypik Théâtre » que la troupe de Béjaia s’est installée.


Dès la première représentation, la pièce fait parler d’elle. Les gens sont émerveillés par le spectacle, et le bouche à oreille fait son travail. La salle est quasiment archi-comble tous les soirs. La presse locale s’intéresse à cette troupe si atypique, et commence à relayer les informations sur le déroulement de la pièce. Une radio de Marseille interviewe la troupe et transmet le message aux auditeurs qui n’ont pas manqué de faire le déplacement pour découvrir la pièce. Les gens se sont montrés ravis, et le ministère français de la culture a dépêché des représentants pour discuter avec Walid Bouchebah et sa troupe. Des producteurs et gérants de salles de spectacles de différentes villes françaises et européennes ont invité la troupe à faire une tournée dans les semaines et mois avenir. L’équipe de « Divorce sans mariage » ne dormait que très peu. Chaque soir, ou presque, les comédiens algériens se faisaient inviter à dîner et les soirées tiraient en longueur. Le lendemain matin, il fallait se lever assez tôt pour reprendre le travail et préparer la représentation de la soirée. Car au fur et à mesure des représentations, la pièce a évolué, et a gagné en maturité et en fluidité. Encouragés par le succès de leur travail, les comédiens ont donné encore plus d’eux-mêmes. Ils en gardent un excellent souvenir.


Malheureusement, à leur retour du Festival ou ils ont dignement représenté notre pays, rien n’a été fait par les autorités locales et nationales pour les honorer et les remercier. La troupe a besoin d’un statut légal et celui de coopérative a, semble-t-il été suspendu par le ministère de la culture. De plus, elle a besoin d’un local, un lieu pour s’établir et se produire. Béjaia ne manque pas de lieux et de salles abandonnés qui pourraient être mis à leur disposition (l’ancienne salle de cinéma dite Shaghaï, Mon Ciné, etc…. Les démarches entreprises auprès des autorités locales sont restées sans effet. Il est temps que notre pays songe à récompenser ses citoyens qui honorent le drapeau national. Il est temps de les encourager et de leur apporter toute l’aide et toute l’assistance dont ils ont besoin. A quelques semaines du démarrage de la huitième édition du festival International du Théâtre de Béjaia, l’Algérie s’apprête à dépenser des milliards pour accueillir des troupes étrangères qui viendront se produire chez nous. Pourquoi ne pas consacrer quelques efforts pour faire en sorte que notre théâtre, au travers de ses acteurs, producteurs et metteurs en scène n’en profitent ?


Nabil Z.

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