La civilisation berbère n’a pas encore livré tous ses secrets. Pour preuve, les chercheurs continuent à faire des découvertes étonnantes montrant combien cette civilisation a été développée et porteuse de grands progrès. C’est en tous cas ce qu’un article de la revue Epoch Times a publié.
Ainsi, une équipe d’archéologues vient de découvrir les vestiges d’une civilisation ancienne inconnue jusque-là, perdue dans le désert du Sahara, dans sa partie orientale se trouvant en Libye. C’est une équipe du CER, Centre Européen de Recherches qui a fait cette découverte, dans le cadre d’un projet appelé Trans-Sahara. Il s’agissait pour cette équipe de chercheurs de l’Université de Leicester de Grande Bretagne, conduite par le Dr Martin Sterry de découvrir les restes d’une civilisation berbère anté islamique et d’étudier son développement. Cette recherche a eu pour but de reconstituer l’histoire ancienne des peuples ayant habité dans ces régions inhospitalières, leurs formations et regroupements, leur organisation, leur vie sociale, et comment ont été établis leurs territoires, et quelle était leur culture. De plus, ces chercheurs ont voulu comprendre quel type de relations ces populations ont pu développer avec les autres peuples de la région : commerce, échanges, migrations, etc…
Une histoire ignorée, une civilisation perdue, la Libye d’autrefois
Pour ce faire, les chercheurs ont fait appel à des outils modernes et des méthodes actuelles pour faire avancer leur travail. Ainsi, ils ont utilisé l’imagerie satellite pour découvrir les contours de cette civilisation et fournir des preuves scientifiques de son existence. Le résultat a dépassé toutes les attentes, puisqu’au lieu de découvrir de simples campements perdus dans le désert, ce fut une véritable ville et de nombreux villages qui ont été découverts. Plus de 100 fermes et villages fortifiés avec des structures similaires à des châteaux ainsi que de grandes villes. Ils ont identifié des murs de briques de boue très complexes, ressemblant à un château, allant jusqu’à quatre mètres de haut, avec des traces d’habitations. Des cimetières cairn (construction de pierre, genre mégalithique), des puits et des systèmes d’irrigation sophistiqués ont également été découverts. Cette civilisation, selon ces chercheurs a prospéré durant les cinq premiers siècles de notre ère.
Selon le Dr Martin Sterry à l’origine de cette découverte, « Les images satellite nous ont permis de couvrir une vaste région. Les preuves montrent que le climat n’a pas trop changé au cours des années et nous pouvons voir que le paysage inhospitalier ne connaissant aucune précipitation, était cependant densément peuplé et cultivé. Il s’agit d’anciens paysages exceptionnels, en termes de caractéristiques et de qualité de préservation ». Son responsable du projet, le professeur Mattingly explique quant à lui : « C’est un peu comme si un voyageur arrive en Angleterre et découvre les châteaux médiévaux. Ces installations ont été ignorées et n’ont jamais été enregistrées pendant le régime Kadhafi ». Ignorées ne veut pas dire inconnues. Les autorités libyennes les connaissaient certainement, mais les avaient intentionnellement ignorées, pour ne pas devoir reconnaitre qu’avant l’arrivée des arabes, les berbères jouissaient d’une civilisation de loin plus développée que celle de l’envahisseur. Kadhafi, leader panarabe ne reconnaissait de civilisation que celle venue du Hidjaz, allant jusqu’à interdire tout ce qui faisait référence aux berbères.
Les Garamantes, ce peuple berbère du désert.
Hérodote, celui qu’on appelle le Père de l’Histoire, avait identifié dans le quatrième volume de son livre Histoire, les tribus berbères. Parmi elles, il avait signalé l’existence d’une tribu nomade appelée Garamantes. Or cette découverte vient remettre en question le caractère nomade de cette tribu. Si les Garamantes avaient construit des maisons et palais, développé des réseaux d’irrigation, montrant en fait qu’ils avaient une vie sédentaire, ce n’était certainement pas pour les abandonner et aller nomadiser loin de chez eux. Par contre, et au vu de l’isolement dans lequel ils se trouvaient, ces peuplades ont dû développer un dense réseau commercial, leur permettant de s’approvisionner et de vendre leurs produits.
L’un n’exclut pas l’autre, en fait. Hérodote avait écrit son livre quelques quatre cents ans avant Jésus6christ. Se pourrait-il qu’à cette époque les Garamantes étaient une tribu nomade avant de se sédentariser quelques siècles plus tard ? Les Garamantes étaient un ancien peuple libyco-berbère connu pour se nomadise, depuis le IIIe millénaire avant notre ère, se déplaçant le long de toute l’Afrique du Nord. Cependant, font remarquer les spécialistes, le mot Garamante veut dire « Les Gens de la Cité », et la racine même de ce nom vient du mot Akham, qui veut dire maison en berbère. Se pourrait-il que leur nomadisme ne fut en fait que l’expression de la recherche d’un lieu où s’installer ? Et qu’en désespoir de cause, ils auraient fini par s’arrêter en plein désert ? Leurs déplacements les auraient menés aussi loin que dans l’Atlas marocain et près du fleuve du Niger. Les nombreuses ruines de l’oued El-Agial témoignent en faveur de cette hypothèse, selon Gabriel Camps, ancien professeur de l’université de Provence. « En fait, ils étaient très civilisés, vivaient dans des installations fortifiées et étaient probablement des agriculteurs d’oasis », explique le professeur Mattingly. « Il s’agissait d’un État organisé en villes et villages, doté d’un langage écrit et de technologies performantes. Les Garamantes étaient les pionniers dans l’établissement d’oasis et ont ouvert la porte au commerce transsaharien».
Une chance pour le peuple libyen de trouver les racines de son histoire
La chute de Kadhafi a ouvert la voie pour les archéologues et leur permet d’explorer la période pré-islamique en Libye, et l’héritage culturel qui a été si longtemps ignoré sous son régime. Le professeur Moore, membre du Conseil scientifique du CER, fait remarquer que l’équipe de David Mattingly va continuer les examens au sol, avec le même enthousiasme. « Nous sommes confiants qu’il poursuivra son exploration importante des exceptionnels trésors de la région ». Ce projet et les résultats qui en découlent ont ouvert la voie à un nouveau commencement pour la Libye, son peuple et le souhait d’un engagement à redécouvrir leur histoire et se l’approprier. « C’est un nouveau départ pour le service des antiquités de la Libye et une chance pour le peuple libyen de s’engager dans son histoire longtemps ignorée », commente le professeur Mattingly. « Ce sont les premières villes construites en Libye qui ne proviennent pas des colonisations grecques et romaines. Tous les écoliers libyens devraient apprendre que les Garamantes font partie de leur histoire et de leur héritage ». Voilà qui est dit. On devrait peut-être aussi aller au-delà de l’actuel Libye pour étendre la visite de ce site à l’ensemble des habitants de l’Afrique du Nord, car ce patrimoine est aussi le leur.
Un peuple berbère du Sahara
Les Garamantes, peuple berbère du Sahara, ont donc formé un État dans l’actuelle Libye. Ce sont ces berbères même qui auraient développé ces cités perdues. Les experts indiquent qu’il s’agirait d’un peuple hautement avancé, culturellement et historiquement, plus important que ce que montraient les sources antiques. Hérodote disait des Garamantes : « Ils ont des chariots attelés à quatre chevaux avec lesquels ils poursuivaient les Éthiopiens ». Signe de maitrise d’une technique de guerre qui les rendait redoutables. Ce sont ces mêmes Garamantes qui ont appris aux grecs les techniques de guerre, toujours à en croire Hérodote.
Les Garamantes étaient donc parmi les plus puissants et les plus évolués des tribus berbères. Ils assuraient le commerce du Nord au Sud de Tamazgha, allant de la Méditerranée aux cultures savaniques africaines, en ayant formé une double influence culturelle.
La Libye et les vestiges de son histoire antique
Le territoire de l’actuelle Libye a connu tout au long de son histoire plusieurs invasions de divers peuples et États, dont les Empires romain et byzantin, l’Empire ottoman et enfin, au XXe siècle, le royaume d’Italie. Ce qui a donné à la Libye un patrimoine culturelle d’une grande valeur. Mais ce pays, depuis la prise de pouvoir par Kadhafi a été mis sous le boisseau, et est resté très peu connu. Heureusement que ce patrimoine est en train de refaire surface, permettant aux archéologues de l’étudier et de le mettre à la disposition du public qui aura le privilège de mieux connaître son histoire.
La Libye compte officiellement cinq sites classés au patrimoine mondial de l’humanité : la ville ancienne de Ghadamès, les sites archéologiques de Leptis Magna, de Cyrène, de Sabratha et le site rupestre du Tadrart Acacus. L’Unesco avait lancé un appel au peuple libyen, aux pays voisins, ainsi qu’à l’ensemble des acteurs du commerce international de l’art et des antiquités, pour protéger les biens culturels du pays et lutter contre le trafic d’œuvres. En effet, la Libye abonde de trésors, venus en particulier des anciennes colonies grecques et romaines de Cyrénaïque. « Le musée de Qasr el-Libya compte des mosaïques de l’époque tardive d’une fraîcheur époustouflante et parfaitement conservées, dont l’une des rarissimes représentations du phare d’Alexandrie », explique Claude Sintes, conservateur en chef du musée de l’Arles antique. « Près de Benghazi dans l’ancienne colonie de Cyrène, qui fut l’une des plus importantes de l’Antiquité, existe la plus belle collection au monde de sculptures grecques de l’époque classique, avec celle d’Athènes, ajoute-t-il. Il s’y trouve des centaines de statues dont la moindre honorerait les plus célèbres musées du monde ».
Les sites classés au patrimoine mondial de l’UNESCO
Les sites classés par l’Unesco sont au nombre de cinq en Libye :
Cyrène fut l’une des principales villes du monde hellénistique. Romanisée, elle demeura une grande capitale jusqu’au tremblement de terre de 365 ap. J.-C. Mille ans de son histoire sont inscrits dans ses ruines qui sont devenues célèbres dès le XVIIIe siècle.
Ghadamès, connue sous le nom de « perle du désert », se trouve dans une oasis. C’est un exemple extraordinaire d’habitat traditionnel et l’une des plus anciennes villes de la région présaharienne : ville fortifiée dont Cornelius Balbus avait fait une alliée de Rome lors de son expédition victorieuse contre les Garamantes, en 19 av. J.-C.
Leptis Magna est l’une des plus belles villes de l’Empire romain, avec ses grands monuments publics, son port artificiel, son marché, ses entrepôts, ses ateliers et ses quartiers d’habitation.
Sabratha, comptoir phénicien drainant les produits de l’Afrique intérieure, fit partie de l’éphémère royaume numide de Massinissa avant d’être romanisée et reconstruite aux IIe et IIIe siècles. Des monuments grandioses furent construits dans la ville dont le plus connu est le théâtre.
Le massif du Tadrart Acacus possède des milliers de peintures rupestres de différents styles, datables entre 12000 et 100 av. J.-C., qui reflètent les changements importants intervenus dans la flore, dans la faune, ainsi que dans le style de vie des populations qui se succédèrent dans cette zone du Sahara.
A quand un inventaire scientifique et rigoureux des ressources archéologiques de Tamazgha et un plan de communication autour de ces sites, avec des programmes de visites ouvertes au public ?
Nabil Z.
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