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Photo du rédacteurNabil Z.

L’Amour au Temps de la Terreur. Dernier Roman de Nabil Ziani

Dernière mise à jour : 24 avr. 2020

Peu de romans ont été consacrés à la Décennie Noire. Or la littérature peut réellement contribuer à jeter un autre regard sur cette période douloureuse. Ce roman historique raconte une histoire d’amour qui s’est déroulée pendant les années quatre-vingt-dix, entre deux personnages de fiction, se faufilant entre les balles et les bombes pour pouvoir survivre.

L’histoire racontée dans ce roman qui vient de sortir aux éditions le Lys Bleu, est inspirée de faits réels. Elle commence à la fin des années quatre-vingt, juste après les événements d’octobre quatre-vingt-huit. Elle nous mène droit vers la période la plus sombre de l’histoire récente de l’Algérie.

Deux étudiants en fin de parcours universitaire se rencontrent lors d’une fête. Tout en se rapprochant l’un de l’autre, il voient l’horizon s’assombrir, et tentent de profiter des derniers moments de paix que le pays pouvait encore offrir. Saïd et Houria s’aiment mais envisagent difficilement l’avenir, au vu de l’atmosphère régnante. Malgré tout, ils résistent et tentent de se construire une vie. Alger est secoué par toutes sortes de troubles, sociaux, politiques et sécuritaires.

Très vite, les islamistes décrètent une grève insurrectionnelle, et bien malgré elle, Houria s’y trouve engagée. Elle disparaît du radar de Saïd, avant de réapparaître quelques mois plus tard, traumatisée par son expérience. Elle raconte ce qu’elle a vu et ce qu’elle a vécu. Quand la période de terreur a officiellement commencé, le couple décide de s’organiser, et de faire face à ces circonstances auxquelles personne ne s’était préparé. Pour bien affronter cette nouvelle situation, les amants ont besoin de prendre du recul, et de construire leur amour et leur couple. Ce fut à ce moment qu’ils partent en une sorte d’exil dans la ville de Béjaia, d’où Saïd est originaire. Un havre de paix, ou il n’y avait ni bombes ni attentats, en contraste avec ce qui se passait dans presque tout le reste du pays. Les tourtereaux prennent le temps de mieux se connaître. Houria, originaire de Médéa, est issue d’une famille prestigieuse, aux talents multiples. Parmi ses ancêtres on compte des lettrés, des religieux, des artistes, des hommes politiques comme son père et des militants de la Révolution. Mais étant enfant, elle a vécu un drame, dont elle vivait encore les conséquences sur le plan psychologique. Cela conditionnera encore sa vie et son amant va tenter de l’en libérer.

Saïd a un passé beaucoup plus inconnu, voire mystérieux. Ses origines remontent jusqu’à l’époque de Ferdinand de Castille et Isabelle la Catholique, qui avaient ordonnés aux juifs et aux maures de quitter l’Espagne au quinzième siècle. C’est ainsi que sa famille va plier bagages et longer les côtes de l’Afrique du Nord jusqu’à cette ville de Bougie ou ils trouvaient le havre de paix qu’il leur fallait.

Le roman est un constant aller-retour entre le présent et le passé regorgé d’Histoire, dans la perspective d’entrevoir une issue pour l’avenir. Tout au long de ce livre, des pans entiers de l’histoire de l’Afrique du Nord, des berbères, des musulmans et des juifs vont être visités. Ils racontent la vie, les interrogations et les pensées des gens de ce pays, depuis plusieurs siècles. Béjaia et Médéa sont connues pour être des bastions dans l’histoire de l’Algérie, et en découvrir certains aspects est sans doute très enrichissant. Vues les circonstances, la religion est au menu des nombreuses discussions menées par le couple. Un des sujets clés tourne autour de la virginité de la femme, de son sens et de son utilité. Par extension, on en arrive à la question des houris du Paradis qui font fantasmer les terroristes, dont le rêve est de pouvoir en jouir de façon effrénée.

Lors du retour du couple nouvellement marié, Saïd et Hourria découvrent une ville encore plus enfoncée dans la violence. Les choses sont encore pire que ce qu’elles étaient avant, et la vie ne tiens plus qu’à un fil. Chaque jour en sortant de la maison, les gens se demandent s’ils vont pouvoir rentrer chez eux, et dans quel état. Des menaces, on en est passé aux attentats individuels, puis aux voitures piégées, avant de voir des bombes exploser dans des cafés, des cinémas et des lieux publics. Ont est passés de quelques morts par jour, pour passer à plusieurs dizaines, avant d’atteindre le pic de plusieurs centaines dans certaines régions.

Puis, ce fut le drame. Un drame qui va complètement changer le cours de la vie, obligeant Saïd à envisager une autre tournure, qui consiste en un retour aux sources salutaire. C’est un roman riche en émotions, en histoires et en Histoire. Il fait réfléchir et pousse le lecteur à regarder les choses de façon différente, en se posant des questions sur le passé qui détermine bien malgré nous l’avenir. C’est donc une autre manière d’appréhender les choses pour influer un tant soit peu sur le cours des choses dès à présent.

C’est le deuxième roman historique de l’auteur, qui a déjà publié une autre histoire d’amour, publié chez un éditeur allemand et traduit en anglais : la dix-huitième épouse.

Aureg D.B.


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