Selon l’encyclopédie en ligne Wikipedia, le Syndrome de Stockholm désigne « un phénomène psychologique où des otages partageant longtemps la vie de leurs geôliers développeraient une sorte d'empathie, voire de sympathie, ou de contagion émotionnelle avec eux selon des mécanismes complexes d'identification et de survie ».
Il existe bel et bien un syndrome qui porte le nom de la ville de Stockholm en Suède, à cause d’un événement qui s’y est déroulé en 1973 et qui fut analysé en son temps par un psychiatre américain, le Dr Frank Ochberg. Ce phénomène avait déjà été décrit par d’autres spécialistes, qui ont travaillé sur le phénomène de l’identification de l’agressé à son agresseur. Selon eux, ce phénomène est une tentative psychique d’adaptation de la personne agressée à une situation traumatique. Dans une réaction très forte qui conduirait la personne mise en danger à rapidement développer un sentiment d’identification lui permettant inconsciemment d’espérer une certaine clémence de la part de son agresseur et le mettrait en situation de réconfort et de sécurité psychologique. Ce phénomène a été longuement étudié, et il a été confirmé particulièrement lors des prises d’otages. Les négociateurs prennent sérieusement en considération ce phénomène quand ils discutent avec les ravisseurs ou preneurs d’otages. Car il est arrivé que quand cette dernière dure plus longtemps que d’habitude, l’agressé s’identifie tellement fortement à son agresseur qu’il devient lui-même un obstacle à sa propre libération.
Toujours selon Wikipedia qui nous rapporte l’histoire, « Le 23 août 1973, un évadé de prison, Jan Erik Olsson, tente de commettre un braquage dans l'agence de la Kreditbanken du quartier de Norrmalmstorg à Stockholm. Lors de l'intervention des forces de l'ordre, il se retranche dans la banque où il prend en otage quatre employés. Il obtient la libération de son compagnon de cellule, Clark Olofsson, qui peut le rejoindre. Six jours de négociation aboutissent finalement à la libération des otages. Curieusement, ceux- ci s'interposeront entre leurs ravisseurs et les forces de l'ordre. Par la suite, ils refuseront de témoigner à charge, contribueront à leur défense et iront leur rendre visite en prison. Une relation amoureuse se développa même entre Jan Erik Olsson et Kristin, l'une des otages. La légende veut qu'ils se soient mariés par la suite, mais cela fut démenti ».
Le phénomène peut donc être à ce point pervers qu’il peut devenir dangereux pour la survie des otages eux-mêmes.
Syndrome de la Femme Battue
A une autre échelle, ce phénomène a également été observé dans des situations de violence conjugale, ou la femme agressée développe une telle empathie à l’égard de son agresseur qu’elle se refuse à déposer plainte contre lui ou même tout simplement de reconnaitre l’origine de ses blessures. Parfois même, elle s’oppose physiquement à l’arrestation de son partenaire délinquant, et ce, en dehors de toutes autres considérations liées à la paternité ou à la situation économique de la femme battue.
Le Syndrome de Stockholm est donc une vérité attestée par la science et largement reproduite dans les médias. Des livres, des chansons et des films lui sont régulièrement consacrés.
Syndrome des peuples colonisés Dans ce même contexte, et à une échelle beaucoup plus grande, il est à se demander si le phénomène de l’identification des peuples agressés à leurs agresseurs ne relève pas de ce syndrome.
En son temps, Ibn Khaldoun avait déjà parlé de l’admiration du colon par le colonisé. Le peuple ainsi soumis tente, d’une façon ou d’une autre de s’identifier à son agresseur et tente de l’imiter pour lui ressembler. C’est un mélange complexe de rejet, d’admiration, de résistance et de désire de se montrer aussi fort et aussi intelligent que l’autre, dans l’espoir, peut-être de le dépasser un jour et de prendre sa place pour le dominer à son tour.
Le phénomène que l’on observe chez les peuples colonisés semble répondre à ce constat, tant les anciennes colonies continuent, malgré leur émancipation politique de reproduire le comportement de l’ancien colon, après avoir vainement tenté de s’assimiler à lui, de s’y identifier et de se l’approprier. C’est pour cela que les mauvais comportements des gouvernements des pays ayant accédé à l’indépendance est souvent pire que celui du colon lui-même.
Syndrome de Constantine A l’occasion de l’événement prévu pour les prochaines semaines, programmé par le gouvernement algérien, et intitulé « Constantine, Capitale de la Culture Arabe », il est à se demander si le phénomène du Syndrome de Stockholm n’est pas en train de se reproduire. En effet, et c’est l’histoire qui nous l’apprend, les arabes ne sont pas venus en amis en Afrique du Nord. Comme disait quelqu’un aucun berbère ne les avait invités à prendre du thé chez nous. Ils se sont imposés par la force de l’épée « Bessif », comme on dit chez nous, causant morts et dégâts considérables. On ne va pas ici, refaire l’histoire de notre pays. Il suffirait de relire Ibn Khaldoun qui disait que quand les arabes rentrent dans un pays, ils le ravagent à tel point que toute trace de civilisation disparaît. Ceci dit, et malgré l’échec des arabes à effacer notre culture, notre civilisation et notre identité, un sentiment d’appartenance à la nation arabe a peu à peu été développé, non pas par les arabes eux-mêmes- ils en sont incapables-, mais par les autochtones. Ce fut aussi le cas en Syrie, en Irak, en Egypte et dans d’autres pays non arabes. L’identification a été tellement forte que l’Egypte pharaonique se fait appeler aujourd’hui « République arabe d’Egypte ».
Le mouvement panarabiste est bien né chez les non arabes de Syrie et d’Irak. Et en Afrique du Nord, les gouvernants ne cessent de se réclamer de l’arabité, malgré le démenti flagrant de l’histoire et de la réalité quotidienne. Et ce phénomène est particulièrement accentué par l’événement de Constantine. Jamais peuple n’a ainsi renié son identité comme c’est le cas avec l’événement de Constantine. C’est un berbère Senhadji qui développera le plus fortement ce syndrome, en l’occurrence Abdelhamid Ben Badis Essenhadji qui déclarera dans un de ses poèmes, que le peuple algérien n’a jamais été autre qu’un peuple arabe (Ma Kana Yaouman Illa Arabi). Ce fut sous la colonisation française. Et les colonisés de l’esprit se sont engouffrés dans cette brèche qui nous a privés de la reconnaissance de notre identité amazighe et notre culture plusieurs fois millénaire, devançant celle des égyptiens et celle des arabes. Cette situation a emmené les peuples d’Afrique du nord à se prendre pour ce qu’ils ne sont pas, c’est-à-dire des arabes.
Beaucoup de jeunes en Tamazgha aujourd’hui, grâce à l’école entre autres, se croient arabes. L’ignorance, ajoutée au syndrome d’identification de l’agressé à son agresseur, a complètement perverti la perception de cette partie du peuple de sa propre identité. Le Syndrome de Constantine est assez révélateur du mal qui nous a atteint. Et le fait que nos gouvernants s’enfoncent dans leur prétendue arabité n’est pas pour nous rassurer. Il conviendrait que cet événement qui débutera en ce mois d’avril soit l’occasion pour tout le peuple de l’Afrique du Nord, de rappeler au monde notre véritable identité. Constantine devra devenir le point culminant de l’arabisation de Tamazgha, annonçant enfin sa décrue, et entamant sa régression au profit d’un retour réel à la vérité historique et d’une ré-appropriation de notre identité amazighe véritable. Le mouvement culturel dans son ensemble devra prendre conscience de la véritable identité de ce peuple et transcrire dans ses réalisations le fruit de cette prise de conscience et la matérialiser sur le terrain. Nos artistes et Hommes de Lettres devront jouer le rôle d’éveilleurs de conscience, pour un retour salutaire à notre identité léguée par nos ancêtres. Alors, et seulement alors, nous pourrons enfin avoir de nouveaux Massinissa, Jugurtha, Juba, Saint Augustin, Apulée, Fronton, Arnobe, et bien d’autres géants qui ont marqué la civilisation humaine par la grandeur de leurs œuvres et de leur pensée. C’est seulement à ce moment-là que le Syndrome de Constantine trouvera sa guérison. Nabil Z.
Comments