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Photo du rédacteurNabil Z.

Les 4966 martyrs de Kairouan

Vers l’an 484 en Byzacène, l’actuelle Tunisie, le roi Vandale a fait exécuter près de cinq mille Chrétiens de toutes les régions d’Afrique du Nord, pour avoir refusé de se convertir à l’Arianisme. Leur martyre eut lieu dans la région de l’actuelle Kairouan, qui n’existait pas encore à l’époque.




Les Vandales étaient considérés par les Romains comme des peuples barbares. Ils sont originaires du Nord de l’Europe (Allemagne, sud de la Pologne, ...) et ont toujours été contre la domination romaine. En 410, ils ont attaqué la ville de Rome et l’ont saccagée. Le Sac de Rome est rapporté par plusieurs témoignages de l’époque.

Continuant sur leur lancée, ces Barbares ont traversé la Gaule et l’Espagne et ont traversé les Colonnes d’Hercule pour envahir l’Afrique du Nord. Ils ont fini par prendre Carthage en 439, traversant la ville d’Hiponne en 430, alors que Saint Augustin vivait ses derniers jours.

Les Vandales professaient une forme de Christianisme qui s’opposait à la foi qui dominait en Afrique du Nord. Le point de discorde entre les deux religions était la doctrine de la Trinité. Cette dernière avait été mise en place par Tertullien de Carthage et avait suscité l’opposition des Chrétiens d’Orient, menés par un évêque originaire de Cyrène, Arius. D’où l’Arianisme.

La conquête de l’Afrique du Nord par les Vandales a été conduite par le roi Genséric à la tête de quatre-vingt mille personnes, hommes, femmes et enfants. Parmi eux, près de vingt-milles soldats. Dès leur arrivée, ils détruisent tout sur leur passage : monuments, temples, oeuvres d’art,... Ils établirent leur première capitale à Saldae, l’actuelle Béjaia, et continuèrent jusqu’à la prise de Carthage. Ils persécutèrent les Chrétiens pour les obliger à se convertir à l’Arianisme. Plusieurs évêques ont été chassés, exilés ou carrément tués. Durant cette période, l’église a été fortement affaiblie et les Vandales installèrent des personnes à leur solde à la tête de ces églises.

L’arrivée d’Hunéric :

A la mort de Genséric, son successeur Hunéric a poussé la persécution jusqu’à son paroxysme. Il réunit ce qu’on appelle un pseudo Concile à Carthage ou il interdit aux évêques de s’exprimer, les invitant à se convertir à l’Arianisme. Il signe un décret obligeant tous les Chrétiens à se convertir à cette religion.

Devant le refus général, Hunéric laissa exploser sa colère et fit arrêter tous ceux qui, de près ou de loin, avaient une responsabilité dans l’église : évêques, prêtres, clercs et même de simples croyants. Leur nombre a atteint le chiffre gigantesque de quatre mille neuf cents soixante-six personnes. Hommes et femmes, pour les faire exécuter.

Victor de Vita :

Cette histoire a été racontée par un autre évêque témoin des faits. Victor de Vita, auteur de la principale source sur l’histoire des Vandales en Afrique du Nord et leur persécution des Chrétiens. Il était membre du clergé de Carthage et jouait un rôle important dans l’aide aux Chrétiens persécutés. Les autorités Vandales l’ont obligé à s’exiler pour l’éloigner des Chrétiens locaux. A son retour à Carthage en 484, il fut témoin de cette grande persécution. Dès qu’il fut en situation de le faire, Victor raconta cette histoire dans son livre.

En dehors des détails sordides de cette histoire si douloureuse et pourtant dont on ne parle presque jamais, un élément peut attirer notre attention. Notamment, sur le lieu ou furent exécutés ces bienheureux martyrs. Leur nombre est impressionnant, rarement atteint, et la période si courte où elle a eu lieu (une année) montre qu’il s’était agi de massacres plutôt que d’exécutions, une sorte de sacrifices de masse en l’honneur de divinités païennes. Car avant les Vandales, les Carthaginois pratiquaient déjà les sacrifices humains. Et dès la prise de Carthage par les Romains en l’an - 146, cette pratique fut totalement éradiquée.

Et voilà que maintenant, ces peuples Barbares venus de la Germanie se remettaient à sacrifier non loin de Carthage, des innocents à qui on reprochait de croire au seul véritable Dieu.

Victor nous informe sur le lieu ou se déroulaient ces massacres. Une région qu’il connaissait bien, puisqu’il en donna la description détaillée. Pour simplifier la chose, cette boucherie eut lieu dans la région de l’actuelle Kerouan, en Tunisie. Cette ville a n’été fondée que vers l’an 670 par le général arabe Okba, deux siècles plus tard. Elle fut la première ville arabe en Afrique du Nord et a servi de base pour l’islamisation de la région.

La conquête arabe de l’Afrique du Nord a été très difficile. Il a fallu soixante-huit ans pour la réaliser après une série de huit invasions. Les six premières n’étaient que des razzias dont l’objectif était le pillage. Et les Berbères y résitèrent infligeant de lourdes pertes à l’ennemi. A la septième vague, Okba décida qu’il fallait établir une base ou un campement pour lui faciliter cette conquête. Et il choisit cette région pour fonder une nouvelle ville à partir de laquelle il était parti conquérir le reste de l’Afrique du Nord.

Quelle relation entre les Massacres d’Hunéric et la fondation de Kérouan ?

Hunéric avait-il compris le principe de base du combat spirituel ? Avait-il compris que les Chrétiens d’Afrique du Nord, rien que par leur présence, formaient une armée spirituelle impossible à vaincre ? En priant seuls ou en groupe, ces croyants formaient un rempart de protection et réduisaient à néant toutes les tentatives des Vandales d’éradiquer le Christianisme de cette région. Quelques furent ses efforts, il ne pouvait que constater ses échecs et ceux de son prédécesseur. Si les Chrétiens prient, et on ne peut pas les en empêcher, le seul moyen d’imposer sa religion au peuple est de faire en sorte que ces Chrétiens n’existent plus. D’où l’idée de leur élimination. Cela s’est fait en masse vidant le pays de sa force spirituelle agissante, l’affaiblissant de l’intérieur.

Hnéric croyait avoir gagné la bataille. Mais en réalité, cela avait affaibli son propre royaume qui a du capituler devant l’arrivée des Byzantins qui ont fait disparaître le royaume Vandale en 533. En assassinant ceux qui priaient pour lui, il s’est affaibli lui même, se retrouvant sans force ni puissance. Et c’est dans cette région spirituellement affaiblie que les Arabes ont pu installer leur base pour étendre leur nouvelle religion. Carthage a été corrompue, affaiblie puis éliminée. Kérouan a pris sa place.

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