Il ne s’agit pas de menaces externes telles que les persécutions ou les tentations du monde. Dans cet article, il est question des dangers internes qui menacent l’existence même d’une Eglise Nord-Africaine encore toute jeune. Tout comme durant les premiers siècles.
L’Eglise Nord-Africaine moderne n’a qu’une quarantaine d’années d’existence et reste donc encore très fragile. Elle n’a pas encore réussi à produire une élite intellectuelle et spirituelle suffisantes pour prendre en charge sa formation et son développement. La plupart des dirigeants des églises locales se sont constitués sur le tas, sans formation spirituelle de base, ni un enseignement théologique équilibré. La télévision et les sites web resent dans la grande majorité des cas, leurs moyens de formation et leurs sources d’informations. Le déroulement des cultes et autres célébrations est essentiellement basé sur la prière et la louange. L’enseignement de qualité reste le parent pauvre de la spiritualité chrétienne en Afrique du Nord aujourd’hui.
C’est justement le faible niveau d’enseignement biblique qui constitue une menace sur cette jeune église. Car par faute de connaissance, le peuple de Dieu risque de périr. L’inspiration de beaucoup de « Pasteurs » reste le modèle du Christianisme dit « Occidental », tel que diffusé sur les chaines de télévision satellitaires ou sur Internet. Dans beaucoup de cas, il s’agit plus de spectacles télé-évangéliques que de formation spirituelle à la Parole de Dieu. Et quand il y a enseignement, il est surtout orienté vers les préoccupations directes des croyants occidentaux, loin de la réalité africaine dans toutes ses dimensions.
Durant les premiers siècles, l’Eglise d’Afrique (Afrique du Nord) s’est beaucoup multipliée jusqu’à atteindre quelques sept milles églises aux cinquième et sixième siècles. Durant toute cette période, on a vu l’apparition de nombreux théologiens, Pères et Docteur de l’Eglise qui ont mis en place l’essentiel de la théologie Chrétienne : Tertullien, Cyprien, Saint Augustin, etc... Mais il y a eu aussi de nombreux faux docteurs qui ont fait beaucoup de mal à l’Eglise d’Afrique, et même au delà. Il s’agit, entre autres, d’Arius de Cyrène et de Donat le Grand de Casa Naegra, près de l’actuelle Tebessa en Algérie.
Pères et Docteur :
Parmi les cinq Pères Africains de l’Eglise, il y a eu Tertullien, Cyprien et Augustin. Chacun a eu un apport considérable à la théologie Chrétienne, et leurs enseignements restent toujours aussi importants aujourd’hui. Pour le résumer, Tertullien a mis en place toute la théologie de la défense de la foi Chrétienne tout en combattant les hérésies. On lui doit notamment la théologie de la Trinité, ayant été le premier à utiliser ce terme. Puis, il nous a également laissé un principe fondamental de foi : « On ne nait pas Chrétien, on le devient ».
Cyprien de Carthage a vécu durant une période trouble de persécutions. Il est lui même mort en martyre, ayant été décapité à cause de sa foi. Cyprien a fondé toute la théologie de l’Eglise. Il est considéré comme le Père de l’Ecclésiologie. « Hors de l’Eglise, il n’y a point de salut », avait-il notamment affirmé, insistant sur la nécessité de rester unis à l’église et s’éloigner des sectes et des fausses doctrines.
Quant à Saint Augustin, il reste encore aujourd’hui le plus grand de tous les théologiens en dehors de Saint Paul. L’Eglise Catholique le considère comme étant le seul théologien à porter les titres de Père et de Docteur de l’Eglise. Il a mit en place l’essentiel de la théologie Chrétienne. Ses deux livres « Confessions » et « La Cité de Dieu » restent encore aujourd’hui, les plus grandes oeuvres Chrétiennes derrière la Bible.
Mais à côté de ces géants de la foi et de bien d’autres encore, l’Afrique du Nord a donné naissance à des personnages qui ont perturbé le développement de l’Eglise et suscité des querelles et des divisions. Et c’est particulièrement de cela dont il est question ici. Car ce qui a été fait à l’époque, risque de se reproduire dans l’Eglise d’Afrique du Nord d’aujourd’hui.
Arius de Cyrène :
Il est le fondateur de la doctrine qui porte son nom : l’Arianisme. Né en Libye au troisième siècle, ce pretre d’une grande intelligence a été appelé en 314 à diriger une église dans les environs d’Alexandrie, en Egypte. Il en a profité pour dispenser un enseignement que ses supérieurs d’Alexandrie ne partageaient pas.
Parmi les sujets traités par Arius, il y avait celui relatif au statut de la personne de Jésus, et sa place dans la Trinité. Ce concept venait juste d’être développé par un autre Nord-Africain, Tertullien. Arius se demandait si Jésus était Dieu ou le Fils de Dieu ? Etait-il engendré ou créé ? Etait-il égal ou inférieur à Dieu ? Bref, des questions qui tournent autour de la définition de qui était vraiment Jésus. Pour Arius, même s’il était parfait et s’est préservé de la chute, Jésus serait une créature, et donc n’aurait pas existé de toute éternité. Ce qui nous rapproche un peu de la définition de l’Islam qui présente Jésus comme un grand Prophète, mais qui, en aucun cas, n’est le fils de Dieu.
Les musulmans qui viennent en grand nombre au Seigneur et découvrent le Fils de Dieu sont souvent harcelés par leurs anciens coreligionnaires pour les dissuader de reconnaître la divinité du Messie. Beaucoup d’anciens musulmans se retrouvent ainsi dans l’incapacité d’expliquer qui est Jésus au regard de la Bible. Ajouter à cela le mystère de la Trinité, les musulmans mettent en doute la foi des nouveaux convertis. Malheureusement, aucune voix n’est venue, pour l’instant, clarifier la question dans le contexte actuel. L’Eglise d’Afrique du Nord a réellement besoin d’enfanter de nouveaux Docteurs capables de mettre au clair les différents concepts de la foi chrétienne, dans le contexte d’une église d’origine musulmane appelée à annoncer l’Evangile.
Ainsi, l’héritière de l’Eglise des Cyprien et Augustin a besoin de se pencher sur les concepts majeurs de la foi de ses Pères afin de mieux expliquer ses positions et ses croyances. Qui est Dieu, qu’est ce que la Trinité, quels sont les noms de Dieu et de Jésus ? Dieu et Allah, sont-ils la même personne, et Aissa, est-il Jésus ?.... L’Eglise d’Afrique du Nord a besoin d’être théologiquement claire !
L’autre problème qui se pose est relatif à l’ambition personnelle.
Dans la Bible, le seul chef de l’Eglise, c’est Jésus qui en est la tête. L’Eglise est enseignée et dirigée par le Saint-Esprit qui est l’Esprit de Dieu. Il n’y a donc aucun autre chef de l’Eglise que Jésus. Son seul représentant sur terre est le Saint-Esprit qui se manifeste par l’Eglise constituée de l’ensemble des croyants en Jésus-Christ, le Fils de Dieu.
Au niveau local, les églises sont dirigées par un conseil d’Anciens. Le Pasteur n’est pas le chef de cette église, il est un de ces anciens. D’autres peuvent être évangélistes, prophètes ou apôtres, mais il n’y a personne à la tête de cette église autre que Jésus-lui même. Dans le Nouveau Testament, on ne trouve nulle part un chef à la tête des églises locales, et l’Apôtre Paul n’a lui même installé que des anciens et il a recommandé à ses disciples d’en faire de même.
Donat le Grand :
En l’an 305, il y eut un important incident qui a divisé toute l’Eglise d’Afrique. Un évêque du nom de Donat, appelé Donat le Grand, originaire de la région de Tébessa dans l’actuelle Algérie, a décidé de contester la nomination d’un Primat à la tête de l’église de Carthage. Le primat est le premier, généralement le plus ancien des évêques. Donat estimait que ce poste lui revenait de droit, et cela a créé de grands remous. Il est même allé à Rome dans l’espoir de s’accaparer du siège de l’Evêque de cette ville, capitale de l’Empire, dans l’espoir de devenir le plus important des Evêques de l’Empire. L’Evêque de Rome sera appelé plus tard, le Pape.
L’amition de Donat l’a emmené à créer un schisme dans l’Eglise d’Afrique. Très vite se sont constituées des églises Donatistes dans presque toutes les villes d’Afrique du Nord, pour faire face à l’Eglise dite Catholique ( c’est à dire universelle). Sans être en désaccrod majeur dans les questions doctrinales, les Donatistes appliquaient les Ecritures à leur manière. Par exemple, quand Jésus a dit que celui qui prend l’épée mourra par l’épée, ils décident de prendre des bâtons à la place des épées et useront de violence envers leurs frères. L’atmosphère spirituelle dans toute l’Afrique du Nord était devenue intenable au point ou l’Empereur Constantin a du interdire l’Eglise Donatiste, alors qu’il venait de décréter la liberté religieuse pour tous.
La course au pouvoir dans l’Eglise Nord-Africaine d’aujourd’hui risque de créer un véritable schisme dans le corps de Christ. Les disputes et frictions constatées ça et là pour s’accaparer de la tête d’une église locale ou même de l’EPA en Algérie, n’est dû qu’au désir charnel de dominer et sur un enseignement erroné quant au fonctionnement du corps de Christ.
Ce qui a divisé l’Eglise d’Afrique aux quatrième et cinquième siècles menace aujourd’hui celle moderne de l’Afrique du Nord. Les silences et les non dits ne favorisent pas la clarté, et l’absence de débat est de nature à créer la confusion et susciter des divisions. Sans en arriver jusque-là, on constate quand même de sérieux désaccords entre certains dirigeants d’églises ou de fédérations. Si quelqu’un aspire à une charge dans l’église, il fait bien et il faudrait l’encourager. Seulement, que cela soit fait selon les règles établies dans la parole de Dieu et que Paul a enseigné à Timothée et à Tite.
Il faudra donc veilleur sur ces deux choses: la doctrine et l'unité.
Nabil Z.
Vous avez tout résumé.. effectivement c'est ce qui se passe chez nous en Algérie. L'ennemi travaille et les croyants n'ont rien vu venir... pourtant le Seigneur a averti dont moi; mais personne n'a voulu m'écouter...