Les Garamantes sont ces berbères du Sahara. Ils étaient connus pour être des bâtisseurs de villes. Leur nom vient de « Igherman », pluriel de Ighrem, la ville. Leur langue était le Tamachek, et leur écriture le Tifinagh, tout comme les touaregs qui leurs sont assimilés en partie.
Le pays des Garamantes, bien que situé dans le désert du Sahara, se composait de quatre grandes zones fertiles qui se trouvent à l’heure actuelle en plein désert du Sahara. Mais le pays n'a pas toujours été un désert. Il ressemblait davantage à une savane, avec des lacs éternels. Une grande population y vivait. Elle était connue comme les artisans de l'art de la faune sauvage, nommés d'après les animaux représentés comme dans le Tassili. Leur outil de prédilection était le silex. Par la suite, il y eut de grandes sécheresses, et la région a été complètement abandonnée. Les lacs ont disparu, laissant de grands champs de sel, qui vont constituer la matière première d’un commerce riche développé par les Garamantes.
Mais, aux environs de l’an 5 000 ans avant notre ère, la mousson a fait venir de la pluie d'Afrique équatoriale vers le nord. De nouveaux lacs se sont constitués et de nouvelles populations s’y sont installées, développant de meilleurs outils, et un art plus avancé ; leurs sculptures rupestres sont dites "pastorales". Malheureusement, entre 3500 et 2000 avant notre ère, la mousson a commencé à se retirer et lavégétation a progressivement disparu. Avec la nouvelle disparition des lacs les populations ont à nouveau déserté la région, emportant avec elles leurs animaux domestiqués, à la recherche de terres plus fertiles, pour enfin se stabiliser dans des zones plus favorables au développement de leur vie. A partir de cette période, les Garamantes se sont développés en toute discrétion, et à part l’élevage et le commerce du sel, il paraît qu’il n’y a pas grand-chose à en dire.
Ce n'est que lorsque le cheval et le dromadaire ont été domestiqués, vers -1500, qu’une relation plus intense s’est développée avec les autres civilisations. C'était l'époque où les langues berbères semblent s'être répandues à l'ouest, permettant ainsi aux Garamantes de sortir de leur isolement.
La plus ancienne capitale des Garamantes semble avoir été Zinchecra, située sur un éperon montagneux à sept cents kilomètres au sud de l’actuelle Tripoli en Libye. Elle a été habitée de 900 avant notre ère jusqu'au premier siècle après Jésus-Christ, mais a été remplacée par une autre ville, Garama (actuelle Jarma), située à quelques kilomètres de là. Les ruines de cette deuxième capitale ont été retrouvées et nous montrent qu’elle s’étendait sur 20 hectares. Elle remonte au moins au début du IVe siècle avant notre ère, et les archéologues y ont trouvé des temples, un marché, des maisons et des bains, dont certains sont en pierre naturelle. Elle était entourée d'un grand mur et d'un fossé. Les archéologues ont également découvert des cimetières avec, au total, environ 120 000 tombes, ce qui correspond à une ville d'environ 10 000 habitants, de la taille d’une autre ville célèbre comme Pompéi. Le centre de la ville était, semble-t-il, le camp de l'armée ; il servait non seulement à contrôler les oasis le long des routes du lac du Tchad, mais aussi à lutter contre les tribus du désert à l'est et au nord-ouest. L’armée de ce pays avait développé les chars à quatre chevaux conduits par les femmes lors des guerres, comme le raconte Hérodote. Les Garamantes semblent avoir été parmi les premiers à avoir développé la construction des pyramides, puisqu’on en trouve plusieurs dans la région. Certes de plus petite taille que celles d’Egypte, mais nettement plus anciennes. C’est aussi dans cette région qu’on a trouvé les plus anciennes traces de la momification des morts. Enfin, des échantillons botaniques ont montré que les habitants produisaient du blé, des dattes, des olives, du raisin et plusieurs autres cultures irriguées par la technique des foggaras.
Selon Hérodote qui a décrit la région vers le cinquième siècle avant Jésus-Christ, et qui a identifié les Garamantes parmi les seize tribus berbères, « Il y a une colline de sel, une source et un grand nombre de palmiers fruitiers, et les hommes qui habitent ici s'appellent les Garamantes, une très grande nation, qui portent de la terre humide pour y déposer le sel et y semer des graines. ... Avec leurs chars à quatre chevaux, ces Garamantes chassent les Éthiopiens des cavernes, et ils sont les plus rapides de tous les hommes ».
Il n’y avait pas que l’armée comme métier chez les Garamantes. Il y avait aussi du commerce. Les produits laitiers et la viande étaient échangés contre des céréales et de l'huile. De l'ivoire, de l'or, d'autres produits d'Afrique subsaharienne et bien sûr du sel étaient échangés avec les produits des artisans urbains. La production intellectuelle semble avoir atteint un certain niveau de développement, puisque des échanges intellectuels se faisaient avec Carthage et tout le monde subsaharien et méditerranéen. Des histoires, témoignant du rôle de la femme dans cette région rapportent que c’étaient des guerrières Garamantes qui veillaient sur l'or du fleuve Sénégal.
Arrivée des romains :
Après la chute de Carthage, au deuxième siècle avant Jésus-Christ, les Romains ont pris le contrôle des ports puniques, et leur arrivée eut un impact énorme sur la région. La réaction des Garamantes fut de s’allier avec le roi Juba I, profitant de la guerre entre Jules César et le Sénat de Rome. Mais les Romains se rendirent compte que la menace garamantienne pouvait être grave, et en 19 avant notre ère le général Lucius Cornelius Balbus marcha contre les Phezaniens et les Garamantes. C’est probablement la raison pour laquelle les Garamntes ont changé de capitale, passant de Zinchecra à la résidence royale à Garama, plus sûre et mieux protégée.
Les conflits entre Garamantes et romains furent nombreux durant plusieurs décennies. Ces berbères, fidèles à eux-mêmes ont d’ailleurs rejoint les armées de Tacfarinas contre Rome en l’an 17. Au début du troisième siècle, les romains ont construit des fort avancés comme Ghadamès pour mieux prévenir les attaques des Garamantes. Au début du cinquième siècle, ces derniers ont rejoint l’armée de Gildon contre Rome.
Mais les Garamantes n’ont pas toujours été en guerre contre les romains. Il y eut des périodes de paix ou d’intenses échanges ont eu lieu entre eux. Les Romains avaient besoin d'or, de sel, d'esclaves, d'ivoire et d'animaux exotiques pour leurs concours de gladiateurs, tandis que les Garamantes avaient besoin de métal, de céramique, d’huile d'olive et d’autres produits. Avec le temps, les relations sont devenues amicales, surtout que les romains croyaient que les Garamantes descendaient du légendaire Apollon. Le développement de la vie culturelle permit aux Garamantes, en échange avec les cités méditerranéennes et l’Egypte de découvrir le christianisme. La ville et le royaume se convertirent officiellement en l’an 569.
Avec l’arrivée des Vandales en Afrique du Nord, les échanges diminuèrent fortement avec les Garamantes, et ce fut dans un état d’affaiblissement économique que les arabes trouvèrent ce peuple au milieu du septième siècle, coïncidant avec le début de la sécheresse qui perdure jusqu’à aujourd’hui, amorçant ainsi le déclin de cette grande nation. Car, nous rappelle David Mattingly dans « Antiquité Africaine », les Garamantes étaient plus qu’une tribu. En témoignent les nombreux domaines développés qui en font un véritable Etat, probablement le plus grand de toute la région. Il cite : le développement de l'urbanisme ; l'évolution d'une société hiérarchique ; l'adoption de l'écriture ; le développement avancé de l'agriculture incluant une série de productions méditerranéennes et sahariennes nécessitant une irrigation intensive (céréales, vignes, olives, dattes) ; l'introduction du cheval, du chameau et des moyens de transport à roues ; la création de relations commerciales et politiques qui s'étendaient au Nord jusqu'à laMéditerranée, à l'Est à l'Egypte et au Sud à l'Afrique sub-saharienne ; et une expansion démographique portée à un niveau qui n'a sans doute pas été égalé depuis lors.
Nabil Z.
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