Depuis quelques jours, la presse internationale et les réseaux sociaux ont repris une information publiée par le site « Popular Mechanics », selon laquelle une équipe de scientifiques britanniques et israéliens auraient réussis à reconstituer le visage de Jésus.
En cette veille de Noël, cette information est certainement de nature à attirer l’attention de nombreux croyants dans le monde. En effet, la croyance populaire, alimentée par une iconographie historique a toujours dépeint Jésus comme étant un homme d’une trentaine d’années, grand, fin, blond aux cheveux longs et aux yeux bleus. Cette image a longtemps été diffusée par les croyants romains, essayant de donner de Jésus une physionomie proche de l’homme européen moyen. Mais c’est là qu’il y a un problème. Jésus n’était pas européen. Il est né et a vécu en Terre Sainte, essentiellement en Israel-Palestine, incluant certainement des parties de l’actuelle Jordanie, du Liban et de la Syrie. Il a même passé une partie de son enfance en Egypte. Il était donc de type méditerranéen. Il aurait pu ressembler à n’importe qui de cette région, et même de l’Afrique du Nord ou du Sud de l’Europe. Mais certainement pas d’un blond aux yeux bleus, comme on a coutume d’en voir des portraits un peu partout.
Mais que dit la Bible à son sujet ? Comment les textes sacrés dépeignent ils le « Fils de Dieu » ? Il est clair, que les évangiles n’ont jamais décrit l’aspect physique de Jésus-Christ. Les évangélistes Mathieu, Marc, Luc et Jean ont axé leurs écrits sur les enseignements du Maitre, ses gestes et paroles, plutôt que son apparence physique ou sa manière de se vêtir. Loin des standards actuels de la communication basés essentiellement sur l’image, le Nouveau Testament n’a jamais fait une quelconque allusion à l’apparence physique de celui que le Coran appelle « Issa Ibnou Mariem ». De plus, un texte prophétique de l’Ancien testament, dans le Livre du Prophète Esaïe, dit de lui : « Il n'avait ni beauté, ni éclat pour attirer nos regards, Et son aspect n'avait rien pour nous plaire. Méprisé et abandonné des hommes, Homme de douleur et habitué à la souffrance, Semblable à celui dont on détourne le visage, Nous l'avons dédaigné, nous n'avons fait de lui aucun cas ». Autrement dit, que Jésus ressemblait à monsieur tout le monde, un homme à l’apparence ordinaire. Son physique n’avait donc rien de spécial. Le fait de ne jamais le décrire physiquement répond à une logique spirituelle toute simple. Il ne s’agit pas d’adorer la créature, mais le créateur. La beauté de Jésus réside dans son esprit et non pas dans son corps. De plus, il n’est pas venu se faire de la publicité pour lui-même, mais de parler de Dieu en s’effaçant devant lui.
Cette insistance occidentale de donner une image à Jésus se heurte à la réalité historique de l’homme du premier siècle. Selon les scientifiques, l’homme méditerranéen de l’époque mesurait en moyenne 1m55 et pesait moins de cinquante kilos. Loin de l’iconographie traditionnelle qui montre Jésus comme un homme grand et fin. De plus, ayant été charpentier, donc travailleur physique, il devait avoir une corpulence musclée, plutôt qu’un corps fin. Ceci dit, les scientifiques qui ont travaillé sur la reconstitution du visage de Jésus ont pris en considération toute une série de paramètres et n’ont travaillé que sur le visage, évitant pour le moment de toucher au reste du corps. Mais comment ont-ils procédé ?
L’équipe israélo-britannique qui a travaillé sur le projet a procédé de manière à reconstituer la forme du visage, à partir d’échantillons réels de crânes d’hommes sémites, ayant habité la région du Moyen-Orient au premier siècle. A l’aide d’algorithmes complexes, ils ont réussi à reconstituer la forme du crâne, avant de travailler sur le reste des éléments, à savoir la peau, les yeux et les cheveux. Pour ce faire, ils ont donc fait appel aux techniques de l’anthropologie médico-légale. C’est une méthode couramment utilisée dans les laboratoires de la police scientifique. Un peu à la manière de ce qu’on voit chez les « Experts » de la série éponyme, ou du Docteur Mallard dans NCIS. La police a souvent recours à ces méthodes pour reconstituer le visage d’une victime à partir d’un crâne. Sauf que dans le cas précis de Jésus, lesdits experts ne disposent pas du crâne original pour être utilisé avec précision. D’où la nécessité de faire appel à des méthodes sophistiquées basées sur des algorithmes complexes, que seuls des spécialistes de haut niveau peuvent manipuler.
Pour obtenir la couleur de la peau et des yeux, ces experts se sont basés sur des tableaux de peintures représentant des personnages sémites de l’époque. Jésus ne devait pas avoir les yeux bleus, mais marrons ou noirs. Les experts ne sont donc pas tombés dans la tentation de les rapprocher de la couleur standard européenne. Ses cheveux ne devaient pas non plus être blonds ; car statistiquement, les méditerranéens ont les cheveux noirs ou châtains. Même si, par exemple, Saint Augustin, pourtant africain avait les cheveux blonds. C’est d’ailleurs à cause de cela qu’à sa naissance il fut appelé « Awragh », c’est-à-dire « le Blond ». Quant à la longueur des cheveux de Jésus, il y a encore débat. Même si la Bible ne recommande pas d’avoir les cheveux longs pour les hommes, la mesure de cette longueur a varié avec les siècles. Des cheveux tombants sur les épaules n’étaient pas toujours considérés comme longs. C’est donc un choix tout à fait aléatoire que les experts ont fait.
Scientifiquement, cette reconstitution a un certain intérêt. Le portrait proposé par la presse pourrait en effet se rapprocher du véritable visage de Jésus. Mais ce n’est pas si sûr, et il faut garder une certaine distance et rester prudents. De plus, il conviendrait peut-être de se poser la question sur l’intérêt de donner une image à quelqu’un qui n’avait pas lui-même estimé nécessaire de le faire, invitant les gens à s’intéresser plus à ses paroles et enseignements plutôt qu’à ses atours physiques. Il disait lui-même que « Dieu est esprit, et que les vrais adorateurs doivent l’adorer en esprit et vérité ». Jamais l’apparence physique n’a été la préoccupation de ses enseignements. D’ailleurs, certains observateurs font remarquer que la Bible n’a jamais fait cas de l’apparence physiques des autres prophètes, axant les textes sur les gestes et les paroles, et non sur la beauté supposée des uns et des autres.
Nabil Z.
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