L'association socio-culturelle « L'Mechta » du village Colonel Amirouche, anciennement Riquet, a lancé un intéressant projet d’encouragement à la lecture pour ses adhérents. L’Mechta projette d'alimenter en ressources la bibliothèque de la Maison des Jeunes du Village situé non loin d’Akbou.
Pour cela, L’Machta a constitué deux commissions chargée de collecter des livres et des documents de toutes sortes pour enrichir le fonds documentaire de la bibliothèque de la Maison de jeunes. La première est située au niveau de la commune elle-même, tandis que la deuxième se trouve en France. Ce qui nous renseigne su les intentions des responsables de cette initiative, à savoir, l’implication de la communauté installée outre Méditerranée. D’ailleurs, un appel public a été diffusé pour aider financièrement et matériellement « ce lieu de ressourcement culturel » et redonner à ses adhérents, l'envie de lire en kabyle et dans toutes les langues.
Dans son communiqué, l’association déclare que « Ce projet est né dans une ère où les technologies modernes ne jouent qu'un rôle d'aliénation et dans une zone du monde où l'Homme boude le livre ». Si lamotivation est louable, ne faut-il pas en modérer l’expression ? Car si les technologies son accusées d’aliénation, ce n’est pas nécessairement de leur faute. C’est plutôt celle des utilisateurs qui ne savent pas en tirer profit correctement. Les technologies ainsi incriminées ne sont nullement responsables de l’usage qu’on en fait.
Le projet en question a été baptisée du nom d’Apulée, « Premier romancier de l’humanité ». Originaire de M’Daourouch dans la région de Guelma, Apulée de Madaure a été l’inventeur d’un nouveau genre littéraire : le roman. Il l’a inauguré en publié une œuvre monumentale intitulée « Métamorphoses », plus connue sous le nom de Le nom de « L’Âne d’or ». Ce choix est judicieux, puisque les donateurs potentiels pourront facilement s’identifier avec ce berbère pure souche qui a tant donné à la civilisation humaine. D’ailleurs, L’Mechta associe à ce nom plusieurs autres auteurs berbères tels que Térence, Mouloud Mammeri, Averroès ou Mohammed Arkoun « et tant d'autres qui ont illuminé le monde de la pensée et du savoir universel ».
L’Association ajoute : « Nous voulons ressusciter cette soif de savoir et faire de notre village le cénacle de la lecture où petits et grands, hommes et femmes retrouveront le goût de l'érudition ». Voilà qui est noble et certainement louable. Remarquons tout de même que pour étancher la soif intellectuelle des gens à l’heure actuelle, le livre à lui tout seul ne pourra certainement pas suffire. D’ailleurs, ce dernier à bien évolué depuis le développement des toutes ces technologies si décriées par L’Mechta. Le livre numérique, les sites Internet, les bases de données, l’information numérique, sons, vidéos notamment, jouent un rôle de plus en plus important dans la société d’aujourd’hui. Pour atteindre ses objectifs, l’Association du village Riquet a choisi dans un premier temps de reculer. Peut être pour mieux sauter ? Car relancer la lecture n’est pas une mince affaire, surtout que les jeunes sont résolument tournés vers les nouvelles technologies. Ne faudrait-il pas plutôt penser à concentrer ses efforts à orienter de façon plus intelligente l’utilisation de ces technologies pour mieux en tirer profit et ainsi atteindre les objectifs initiaux ?
Le livre permettra certes aux jeunes de se réunir, d'échanger des idées et de débattre des sujets intéressants. Mais les technologies aussi, si toutefois elles sont bien utilisées. « Le livre va offrir à nos lycéens, universitaires et chercheurs les moyens d'accès au savoir et à la culture », nous apprend le communiqué de l’Association. Et c’est tout à fait vrai. Mais c’est largement insuffisant à l’heure actuelle. D’ailleurs, les sociologues ne parlent plus seulement du livre en tant que support, mais de l’acte de lire, et ce, quel qu’en soit le support. Car la manière dont nos jeunes consomment les informations est plus importante que le support qui les transmet. Les jeunes ont besoin de savoir lire. Lire un texte, lire une vidéo, lire une image. Ils ont besoin de développer leur esprit critique pour pouvoir distinguer ce qui leur est utile et ce qui ne l’est pas, ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas. La lecture livresque que nous encourageons avec force n’est hélas plus suffisante, même si elle est indispensable. C’est aussi ce qui ressort du communiqué de L’Mechta quand il dit « Le livre va nous ôter les mauvais réflexes, il va nous octroyer l'amour de la vie ». Il faudra donc à veiller au développement des moyens pédagogiques adéquats pour atteindre ces buts.
Pour finir, l’Association Culturelle du village Colonel Amirouche fait un appel aux dons. Elle vise particulièrement « la diaspora », lui demandant d’aider à « remplir la bibliothèque de la Maison de Jeunes de Riquet avec un nombre important de livres de valeur: littérature universelle, philosophie, économie, politique, histoire, médecine, psychologie, sciences humaines et sociales, etc ».
« Sur les traces d’Apulée » ne devrait pas s’arrêter au support papier et au genre littéraire, mais devrait aller plus loin, dans l’objectif est de révèler de nouveaux génies dans tous les domaines du savoir humain. Ce dont notre peuple est capable, l’ayant déjà démontré à plusieurs reprises.
Nabil Z.
Comments