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Photo du rédacteurNabil Z.

Tabelbala, une Région d’Algérie, Unique en son Genre.

Quelque part, à quatre cents kilomètres au sud de Béchar dans l’ouest algérien, se trouve une commune unique en son genre, tant par rapport à son relief qu’à celui de lalangue de ses habitants.


Tabelbala est une commune de la wilaya de Béchar. Elle est très peu connue des algériens, car relativement isolée du monde. Dans l’histoire, cette région située entre l’Erg Erraoui et Djebel Lakhal était reconnue pour son commerce de Sel. Raymond de Lulle, cet intellectuel et philosophe de Majorque célèbre pour ses disputations philosophiques et religieuses en Algérie, racontait au treizième siècle que des milliers de chameaux chargés de sel quittaient Tabelbala pour vendre leur marchandise dans les villes et régions environnantes, sur les marchés internationaux de l’époque. Hassan El Wezzan -Léon l’Africain- leur attribuait une production dattière importante, avec une faune variée -cerfs, gazelles, autruches-, même si la région souffrait d’un manque d’eau. Selon lui, « les arabes les réduisirent à une extrême pauvreté » en les isolant des régions environnantes. 

Dans la littérature moderne, plusieurs astronautes américains ont pris des photos de cette région depuis la station spatiale internationale, l’ISS. Ils affirment que depuis l’espace, Tabelbala représente l’un des paysages les plus beaux de la Terre.

Mais qui sont les habitants de cette région ?

On ne sait à quand remonte la première occupation humaine de cette région. Cependant, on y trouve des sites préhistoriques importants, comprenant notamment des tombes géantes au nombre de sept, et plusieurs autres vestiges répartis sur ses localités comme Kwara, Ifrinyu et Yami. Plusieurs ruines attestent d’une vie sociale importante dans larégion, même si on ignore tout de leurs bâtisseurs et des circonstances de la désertion des lieux, peut être provoquée par la sécheresse. 

On sait cependant que dès le XIème siècle, des nomades appelés les Lemtoun s’y sont établis. Leur premier souci fut d’y trouver de l’eau, et on y retrouve encore aujourd’hui des foggaras très anciens. Mais l’Oasis, à cause de la richesse de sa palmeraie ne tarda pas à être ré-habitée par des nomades venus notamment du Tafilalet et de l’Afrique de l’Ouest. L’élevage et la chasse furent en partie les ressources développées dans cette région pour assurer la survie de ses habitants et le développement de la région. Des caravanes étaient organisées depuis ce lieu, se rendant notamment vers le Maroc et la Maurétanie et encore plus loin dans le sud, en plus du Nord de l’Algérie. 

Les français ne prirent la région qu’en 1910, après cinq années de combats acharnés avec les tribus locales, dont les Ait Sful. Selon Wikipedia, « sa population est constituée principalement des Haratins (descendants d'esclaves Mandingues) les premiers sédentaires de l'oasis. Leur origine nilosaharienne Songhai a beaucoup contribué à l'émergence du dialecte belbali ».

La langue Belbali.

Justement, au sujet de la langue des Belbalis, le site web Nessahra raporte que « Tabelbala présente la caractéristique unique en Algérie de compter parmi eux des locuteurs d’un dialecte qui n’appartient ni à la famille des dialectes arabes, ni à celle des dialectes du tamazight : le korandjé ou kwarandzey (signifiant « langue du village »), aussi connu sous le nom de belbali ».

Cette langue est encore parlée par des milliers de personnes aujourd’hui dans cette région qui compte plus de cinq mille habitants. « Le korandjé est un dialecte songhaï appartenant à la famille nilo-saharienne. Les dialectes songhaïs sont principalement parlés dans certaines régions du Niger, du Mali, du Burkina Faso ainsi que du Nigeria et du Bénin. La présence de ce dialecte dans la région s’explique alors par les origines songhaïs de nombreux de ses habitants » ajoute le site touristique.

C’est le commerce trans-saharien qui a permis à ces populations du sud de venir s’installer dans cette région, apportant avec elles leurs langues et leurs cultures. Leurs parlers respectifs ont dû se mélanger avec les parlers locaux qui sont les tamazight et l’arabe dialectal, se laissant ainsi transformer pour former l’actuelle langue appelée Tabelbali.

Danger sur la langue.

Malheureusement, ce que la colonisation n’a pas réussi à faire, les programmes scolaires officiels en Algérie ont mis en danger la langue Belbali. Ils ont peu à peu imposé l’arabe au détriment de la langue locale. Ce qui fait que les enfants, pour des raisons pratiques, ont eu tendance à abandonner l’usage de leur langue maternelle au profit de lalangue de l’école, devenue par la suite celle de l’administration. 

Cependant, la résistance naturelle face au danger de disparition de cette langue a fait qu’elle soit reléguée à son utilisation dans les cercles familiaux, la préservant ainsi d’une disparition définitive annoncée. Mais elle tient bon, surtout que les événements sociaux comme les fêtes et les cérémonies funèbres sont pratiquées dans cette langue qui trouve ainsi des espaces d’expression lui permettant de tenir face à l’invasion d’une langue officielle qui se retrouve à son tour reléguée dans les espaces administratifs, sans prise réelle sur la société profonde. 

Le Tabelbali est l’un des rares vestiges linguistiques de l’Afrique de l’ouest en Algérie. Il raconte l’histoire de migrations rendues possibles grâces aux échanges commerciaux caravaniers. C’est tout un pan de notre histoire qui est préservé dans cette région d’Algérie, et il est du devoir de l’État de le préserver.

Nabil Z.

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