Depuis le quatrième siècle, l’Europe a adopté le Catholicisme comme religion officielle, par décision de l’empereur Constantin. Mais avant lui, une autre doctrine avait pris place dans tout l’empire, mise en place par un prêtre berbère.
Depuis le début du 2eme siècle, et la disparition des contemporains de Jésus, la foi chrétienne a été le sujet de vifs débats, aussi bien au proche-orient, en Asie mineure, en Europe qu’en Afrique. Car à l’époque, l’imprimerie n’existait pas encore, et la circulation des manuscrits des Evangiles et de la Torah restait très limitée. Ce qui donnait lieu à des spéculations sans fin et des débats aussi intéressants que houleux. Souvent, les polémiques prenaient fin quand les gens accédaient enfin aux textes originaux répondant ainsi à leurs nombreuses questions.
L’Afrique du Nord a souvent été le théâtre de ces nombreux débats, à en juger par le nombre de Pères de l’Église originaires de cette région du monde. On connaît bien sûr Saint-Augustin, Cyprien, Tertullien, et bien d’autres. Tertullien a été parmi les premiers à être reconnu dans ce domaine, ses écrits ayant fait foi, et ses exégèses autorité.
Parmi ces homme d’église, il y a eu un autre homme, originaire de Libye, du nom d’Arius. Il a été fondateur d’un courant très puissant, appelé l’Arianisme, que les catholiques ont combattu de toutes leurs forces.
Qui était Arius ?
Selon l’encyclopédie en ligne Wikipedia, « Arius (version latine du prénom Ariuc, 256-336) est un prêtre, théologien et ascète chrétien libyen d'origine berbère inspirateur de la doctrine qui porte son nom : L’arianisme ». Le contexte historique dans lequel vivait Arius peut expliquer beaucoup de choses. Les chrétiens de son époque étaient fortement persécutés par Rome, et les nombreuses églises, tant en Afrique du Nord qu’en Asie, puis plus tard en Europe, ont payé cher leur fidélité à leur foi. On comptait de nombreux martyrs dans toutes les parties de l’Empire. C’est à cette époque, en l’an 314, alors qu’il venait d’avoir cinquante-deux ans, qu’Arius a été appelé par les autorités ecclésiastiques d’Egypte, qui l’ont nommé à la tête d’une église non loin d’Alexandrie. Dans cette ville, il trouve les conditions nécessaires à l’étude et la recherche, et se met à donner des enseignements qui vont irriter ses supérieurs et provoquer des réactions hostiles à son encontre.
Petit à petit, le libyen met en place une doctrine sérieuse pour répondre aux multiples questions que se posaient ses fidèles et que personne ne pouvait traiter sans susciter des vagues à ce sujet. En fait, la doctrine d’Arius était une réaction contre le monarchianisme qui tend à confondre les trois personnes Père , Fils et Saint Esprit. Arius s’est donc intéressé à la personne divine, tentant de la définir du mieux qu’il pouvait. Mais sa perception du sujet heurtait profondément les convictions de sa hiérarchie. Celle-ci, au lieu d’engager des débats avec lui, a d’abord préféré lui tourner le dos avant de le combattre férocement.
Parmi les sujets traités par Arius, il y a celui relatif au statut de Jésus, et sa place dans la Trinité, concept qui vient d’être inventé par une autre berbère, Tertullien. Jésus était-il Dieu ou le Fils de Dieu ? Etait-il engendré ou créé ? Etait-il égal ou inférieur à Dieu ? Et toutes sortes de questions délicates que seuls les érudits pouvaient normalement approcher. Non seulement sa conception du sujet était différente de celle de ses supérieurs, mais on lui reprochait surtout d’avoir osé s’en approcher. Car plus tard, l’Église catholique jugera le sujet tellement sacré qu’elle en fera un dogme indiscutable. Mais le berbère ne l’entendait pas de cette oreille. Il estimait qu’il était en droit de se poser des questions, de combattre certaines des doctrines existantes et même, d’en avancer une, quitte à se mettre à dos ses responsables.
La réaction du peuple aux nouvelles thèses d’Arius a été immédiate. Les gens ont tout de suite adhéré à sa façon de voir, voyant dans son enseignement une explications simple, et des réponses concrètes à leurs questions. En Egypte , en Libye dans les provinces de l’Orient et d’Asie Mineure, l’arianisme fait de plus en plus d’adeptes. En 320, Alexandre le premier responsable de l’Église d’Egypte convoque un synode local des évêques d’Egypte et de Libye pour condamner et excommunier Arius. Il est chassé d’Alexandre, se réfugie chez Eusèbe de Nicomédie (l’actuelle Izmit en Turquie) et alerte ses amis à qui il demande leur soutien. Des synodes locaux interviennent en sa faveur et son problème devient politique.
L’arianisme progresse dans tout l’Empire, et les gens ne cachaient plus leur adhérence à cette nouvelle doctrine, semant ainsi le trouble et l’émoi dans les milieux ecclésiastiques poussant les autorités à réagir.
Le fulgurant succès d’Ariane
Pour essayer de contenir le succès de la doctrine arienne dans le monde, ses adversaires, y compris ceux qui ne le connaissaient pas personnellement, se sont mis à diffuser des calomnies à son sujet pour essayer de le discréditer en s’attaquant d’abord à sa personne, puis à sa doctrine. Un certain Épiphane a dit de lui : “C’était un homme de haute stature, d’aspect mortifié, composant son extérieur comme un serpent rusé, capable de s’emparer des cœurs sans malice par la fourberie de ses dehors. Car le personnage portait toujours un demi-manteau et une tunique courte sans manches; il parlait avec douceur, séduisant les âmes et les flattant”; Un autre, Rufin d’Aquilée : “Homme pieux davantage par l’allure extérieure que par la vertu, mais follement avide de gloire, de louange et de nouveauté.” On diait aujourd’hui qu’Arius était devenu l’homme à abattre. Pourtant, les témoignages à son sujet le dépeignaient tout autre. Amène, simple et modeste, chaste,… Cependant, c’était un redoutable communicateur, un orateur écouté et un enseignant reconnu. Tout comme les autres Pères berbères, à l’exemple du rhéteur de Taghaste, Saint-Augustin.
« Son enseignement, qu’il sut faire passer en cantiques faciles à mémoriser par ses ouailles qu’il faisait déambuler en processions dans les rues du quartier, ne nous est connu directement que par trois de ses lettres, les seules conservées, ainsi qu’une quarantaine de vers de son poème intitulé la Thalie ou le Banquet, cités par Athanase », nous dit Annick Martin, Professeur émérite à l’université de Rennes 2.
Cette situation oblige l’Evêque d’Alexandrie à organiser des débats ouverts avec les prêtres et les diacres de sa région. Il prit le temps de discuter dans le cadre du presbyterium qu’il présidait, en organisant des débats contradictoires. Mais les deux parties restèrent sur leurs positions. Les troubles suscités par les prêches et manifestations diverses menaçant l’unité de son Église déjà fortement mise à l’épreuve, l’évêque, usant de son autorité, finit par trancher: Arius fut rayé du registre des prêtres avec dix-sept autres clercs. D’abord circonscrit à la seule Église d’Alexandrie, le débat était en train de gagner d’autres Églises en Orient par la campagne de lettres lancée par Arius auprès d’autres évêques. Eusèbe de Césarée qui deviendra un des Pères de l’Église, un héritier d’Origène, réunit la majorité des évêques de Palestine dans un synode qui autorisa les prêtres condamnés à poursuivre leur ministère à Alexandrie, contrairement au droit ecclésiastique.
Expulsé de la ville par les autorités civiles, Arius fut accueilli à Césarée, comme jadis Origène. Il écrit à Eusèbe de Nicomédie, pour l’informer de la persécution qu’il subit pour sa foi; il la lui expose comme une évidence, et essayant de se défendre contre ses détracteurs.
Entre temps, de plus en plus de pays adoptèrent la doctrine d’Arius, en faisant quasiment une religion officielle. Toute l’Asie mineure et la majorité des pays d’Europe l’adoptèrent également, jusqu’en Espagne. En Afrique du Nord, les débats ont été très vifs, mais pacifiques. Car l’Afrique regorgeait de philosophes et de rhéteurs, préférant débattre que se battre.
C’est sur ces entrefaites qu’intervient Constantin, empereur de Rome. Soucieux de réaliser l’unité de l’Empire, il prit la décision de se convertir et de se faire catholique, l’imposant pour la première fois comme religion officielle. Organisant lui-même un concile historique à Nicée, il ordonna de mettre en place la doctrine officielle de l’Église catholique, dans laquelle les enseignements d’Arius furent rejetés et combattus, y compris en utilisant la coercition et la force. Sans l’intervention de l’autorité politique, il est fort à parier que la doctrine du prêtre berbère Arius aurait été la religion dominante en occident, et probablement aussi dans la monde.
Nabil Z.
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