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Photo du rédacteurNabil Z.

Petilianus et la Littérature Donatiste.

La littérature donatiste a été féconde et brillante en Afrique du Nord, du temps même de Saint Augustin. Ce fut une période intense de combat et de débats intellectuels.


La littérature donatiste a été très combattue, et il ne nous reste qu’un nombre limité de ses publications, même si plus d’un millier de fragments existent encore et sont préservés dans différentes bibliothèques en Europe.

L’intérêt de cette littérature, en plus de sa qualité littéraire propre, c’est qu’elle nous renseigne sur le contenu et l’intensité des débats qu’il y avait à cette époque, entre deux écoles : cette dite Catholique, représentée par Saint Augustin, et celle dite Donatiste, représentée par Petilianus.

L’école catholique à l’époque d’Augustin ne représentait pas le Catholicisme tel qu’on le connaît aujourd’hui. Ce serait, en utilisant un terme moderne, l’école universelle. Quant aux donatistes, ils représentaient une large frange de la population de l’Afrique du Nord en désaccord avec ce que représentaient les catholiques et l’empire romain.

Très peu de publications donatistes sont aujourd’hui disponibles. L’embargo sur cette littérature semble continuer, même après quinze siècles. Selon Paul Monceaux, « On a publié seulement quatre ou cinq ouvrages donatistes : trois sermons ou relations martyrologiques, le De septem regulis de Tyconius, et des parties de son Commentaire sur l'Apocalypse ». On a pourtant des ouvrages complets de Petilianus et de Gaudentius ; plusieurs fragments de Donatus de Carthage, de Parmenianus, de Tyconius, de Primianus, de Petilianus, de Gaudentius, de Cresconius, etc. ; fragments de lettres diverses ; une riche série de discours prononcés à la conférence de 411 ; actes des conciles donatistes, procès-verbaux d'enquêtes judiciaires, fragments de plaidoyers d'avocats donatistes devant les magistrats romains.

Pétilianus, l’Evêque donatiste de Constantine a été l'un des plus importants polémistes du donatisme. Avocat e métier, il avait fréquenté l'Église catholique au début de sa conversion. Il fut élu évêque de Constantine par les Donatistes, à cause de son érudition et son désir sincère de servir sa foi. Par la force des choses, il s’est retrouvé un des chefs du parti. Durant la conférence de Carthage à laquelle il avait été convié en 411, organisée par Saint Augustin, il fut l'un des sept représentants officiels de l’église Donatiste, en plus des dizaines d’évêques venus de toute la région, face à des dizaines d’autres représentant les catholiques. Sa présence a été déterminante dans le succès de cette conférence ou les gens ne venaient pas seulement pour chauffer les bancs. Chacun défendait ses arguments avec force conviction, déployant connaissances, intelligence et éloquence. Et justement, Pétilianus se fit remarquer par son éloquence, et aussi par son entêtement et son intransigeance. C'était un homme distingué à qui Saint Augustin reconnaissait un grand talent, empreint de science et d'éloquence. C’était un grand polémiste. Ce que confirment volontiers ses ouvrages publiés tout au long de sa carrière. 


Parmi les écrits de Pétilianus, il y a ce pamphlet adressé aux clercs donatistes intitulé : Epistula ad preshyteros et diaconos donatistas adversus Catholicam. Une épitre contre le catholicisme. Paul Monceaux, docteur en lettres et membre de l’École française d’Athènes au début du 20ème siècle, a pu reconstituer cet ouvrage considérable, qu'il a divisé en 64 chapitres. 


Dans cette épitre, Petilianus traita, à grand renfort de citations bibliques et invectives, les questions chères aux donatistes, comme le second baptême, les causes du schisme, les persécutions et les cruautés subies de la part des catholiques, et d’autres sujets encore. 

Augustin, évêque d'Hippone, écrivit de son côté le livre I Contra litteras Petiliani, en réponse aux arguments développé par l’évêque donatiste. Il déclare : « Afer Sum ». Je suis africain. Sous- entendu, je suis comme toi. Ce traité est un chef-d'œuvre de polémique, par la force des arguments qu’il présente, l'habileté de la réfutation des arguments de Pétilianus, l'ordre et la clarté de l'ensemble. On y sent aussi l'âme ardente de l’Évêque d’Hippone, et son vif désir de ramener les Donatistes de leurs erreurs, qui par orgueil et par dépit s'obstinaient à demeurer schismatiques. Mais Petilianus répliqua par un violent pamphlet, Y Epistula ad Augustinum, Epitre contre Augustin. Petilianus le traite de manichéen, de contumace, de libertin, de sorcier, de sacrilège. Les échanges, surtout de la part du donatiste furent houleux. 

Parmi les autres œuvres de Petilianus, M. Monceaux cite encore des fragments d'une seconde lettre à Augustin, et d'un traité De unico baptismo; puis la série des discours prononcés à la conférence de 411 , où l'évêque donatiste de Constantine tint souvent tête à l'évêque catholique d'Hippone.


La polémique fut donc assez vive pendant des années, et la non-disponibilité des œuvres donatistes handicape les chercheurs qui ne disposent que de la version d’Augustin. Or, cette littérature donatiste, au même titre que celle d’Augustin font partie du patrimoine littéraire africain, pour ne pas dire berbère. Il conviendrait de les étudier et de les mettre à la disposition du grand public qui ignore tout de cette histoire qui pourtant, est la sienne.

Nabil Z.


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